La débacle de la rivière Chaudière à St-Joseph-de-Beauce avec l'eau dans les "fonds" (Crédits photo : H. Giguère)
Version complète de l'intervention en PDF
Titre: «Ce fond où Dieu agit et où son divin esprit opère »
Commentaire sur la Lettre CCLXVII de sainte Marie de l'Incarnationjavascript:void(0)
par Mgr Hermann Giguère P.H.
professeur titulaire de théologie spirituelle et d’histoire de spiritualité de 1968 à 2002 et professeur associé de la Faculté de théologie et de sciences religieuses de l'Université Laval.
Raymond Brodeur, responsable scientifique du Centre d’Études Marie de l’Incarnation (CÉMI), m'a de nouveau demandé une intervention au Séminaire du CÉMI du 6 mai 2016 portant sur la thématique entre cœur et raison chez Marie de l’Incarnation. J’ai accepté volontiers d’autant plus que ce thème du « fond » ou de l’ « état foncier » chez Marie de l’Incarnation m’a toujours fasciné. J’y ai consacré un article dans le Laval théologique et philosophique intitulé « Une voie de l’indicible : le fond de l’âme » dans Laval théologique et philosophique, vol. 53, n° 2, 1997, p. 317-333 qu’on peut lire sur internet à l’adresse suivante
https://www.erudit.org/revue/ltp/1997/v53/n2/401077ar.pdf .
Voici le plan de mon intervention. Pour lire le texte complet en PDF cliquez ici.
PLAN
Introduction
I – Le topos du « fond » dans les écrits spirituels
a) chez les mystiques rhéno-flamands
b) en France au XVIIe siècle
II – Les ramifications du terme « fond » dans le langage courant
a) Premier volet : le sol, assise solide
b) Second volet : le sol, terre nourricière
c) Troisième volet : les profondeurs
III – Le traitement que fait la Lettre CCLXVII du « fond »
a) Lignes 45-50 : le « fond », une solidité à toute épreuve
b) Lignes 29-36 : le « fond », une expérience en mouvement
c) Lignes 54-59 : le « fond », une expérience de plénitude
Conclusion
J’ai tenté de contextualiser les trois phrases où il est question du « fond » dans cette merveilleuse lettre. Permettez-moi, en conclusion, de souligner comment ce thème du « fond » fait ressortir l’unité de vie remarquable de Marie de l’Incarnation, où action et contemplation se marient dans une harmonie continuelle ce qui en fait une des grandes mystiques apostoliques de l’histoire de la spiritualité chrétienne à l’égal de saint Paul et de saint Ignace de Loyola. Marie n'a pu allier action et contemplation que sous la mouvance de ce « fond » où l'esprit apostolique est nul autre que l'Esprit de Jésus-Christ, le divin Époux, cet Esprit qui la suivre les pas de Jésus et s'identifier au désir du Verbe d’amener toute l’humanité avec lui dans le sein du Père.
Dans notre Église et devant les défis auxquels fait face la transmission de la Bonne nouvelle aux générations montantes, le danger est grand de démissionner ou encore d’adopter, vu la pénurie d’ouvriers et d’ouvrières, une attitude de laisser-faire néfaste. L’ « amplification du Royaume », l’annonce de la Bonne Nouvelle, procède non seulement d’une volonté constante et tenace, mais aussi et surtout d’une rencontre vivante avec le Ressuscité que notre sainte a vécue intensément à tout instant, au point qu’à soixante-dix ans, dans une Lettre au Père Poncet datée écrite le 17 septembre 1670, quelques jours avant celle à son fils que nous avons en main, elle lui fait au Père Poncet cette confidence qui va exactement dans le même que ce qu’elle écrit à son fils. On ne peut que penser que ces deux lettres ont été écrites dans la même foulée avant le départ des bateaux à l’automne 670.
"… Dieu me fait compâtir avec cet état celuy de l’union qui me tient liée à sa divine Majesté il y a plusieurs années, sans en sortir un seul moment. Si les affaires soit nécessaires, soit indifférentes font passer quelques objets dans l’imagination ce ne sont que de petits nuages semblables à ceux qui passent sous le Soleil, et qui n’en ôtent pas la veue que pour quelque petit moment, le laissant aussi-tôt en son même jour. Et encore durant cet espace Dieu lui au fond de l’âme, qui est comme dans l’attente, ainsi qu’une personne qu’on interrompt lorsqu’elle parle à une autre; et qui a néanmoins la veue de celuy à qui elle parloit. Elle est comme l’attendant en silence, puis elle retourne dans son intime union." ( Lettre CCLXII de Québec au P. Poncet le 17 septembre 1670 )
« L'amplification du Royaume » est le pain quotidien de Marie de l’Incarnation et sa préoccupation lancinante qui s’appuient sur son « fond », cet espace de rencontre où « Dieu luit au fond de l’âme ».
Questions et échange.
6 mai 2016
