Aujourd'hui nous est né le Sauveur du monde, qui est le Christ Seigneur, dans la ville de David (cf. Lc 2, 11-12), qui est Bethléem. Nous devons donc y accourir comme firent les bergers lorsqu'ils eurent entendu cette nouvelle, et mettre en pratique les paroles que nous chantons traditionnellement à cette date : Ils chantèrent la gloire de Dieu, ils accoururent à Bethléem (cf. Lc 2, 15.20).
Et ceci, dit l'ange, sera pour vous un signe : vous trouverez un enfant enveloppé de langes et déposé dans une mangeoire (cf. Lc 2, 12-13). Or, voici ce que je vous dis : vous devez aimer. Vous craignez le Seigneur des anges, mais aimez le petit enfant ; vous craignez le Seigneur de majesté, mais aimez ce petit emmailloté ; vous craignez celui qui règne dans le ciel, mais aimez celui qui est couché dans une mangeoire.
Quel signe les bergers ont-ils donc reçu ? Vous trouverez un enfant enveloppé de langes et couché dans une mangeoire. C'est lui le Sauveur, c'est lui le Christ, c'est lui le Seigneur. Mais qu'y a-t-il de remarquable à être emmailloté et couché dans une mangeoire ? Est-ce que les autres enfants ne sont pas emmaillotés aussi ? En quoi consiste donc ce signe ?
Il est remarquable, certes, mais pourvu que nous le comprenions. Nous comprenons non seulement si nous entendons la nouvelle, mais si nous avons aussi dans notre cœur la lumière qui apparut avec les anges. L'ange qui proclama le premier la bonne nouvelle apparut entouré de lumière pour nous apprendre que ceux-là seuls entendent vraiment, qui ont dans l'esprit la lumière spirituelle.
On pourrait dire bien des choses sur ce signe, mais comme l'heure passe je n'en dirai que peu et brièvement. Bethléem, " la maison du pain ", c'est la sainte Église, où l'on distribue le corps du Christ, le vrai pain. La mangeoire de Bethléem, dans l'Église, c'est l'autel. C'est là que se nourrissent les familiers du Christ. Au sujet de cette table, il est écrit : Tu prépares la table pour moi (cf. Ps 23(22), 5). Dans cette mangeoire se trouve Jésus emmailloté. Cet enveloppement de langes, c'est l'aspect extérieur des sacrements. Dans cette mangeoire, sous l'apparence du pain et du vin, il y a le vrai corps et le vrai sang du Christ. Là, nous voyons qu'il y a le Christ en personne, mais enveloppé de langes, c'est-à-dire présent de façon invisible sous les sacrements. Nous n'avons pas de signe aussi grand et aussi évident de la naissance du Christ que le fait de consommer quotidiennement son corps et son sang au saint autel, et le fait que lui, qui est né pour nous d'une vierge une seule fois, nous le voyons chaque jour s'immoler pour nous.
Donc, mes frères, hâtons-nous vers la crèche du Seigneur, mais, autant que nous le pouvons, préparons-nous à cette approche par sa grâce, en tant qu'associés aux anges, avec un cœur pur, une bonne conscience et une foi sincère (cf. 2 Co 6, 6), nous chanterons au Seigneur par toute notre vie et notre comportement : Gloire à Dieu dans les hauteurs, et sur la terre paix aux hommes, objet de sa bienveillance (cf. Lc 2, 14). Par notre Seigneur Jésus Christ, à qui appartiennent l'honneur et la gloire pour les siècles des siècles.
Amen !
Sermons pour Noël 2, PL 195, 226-227
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Moine et abbé cistercien, né à Hexham, Aelred (ou Ailred) vécut à la cour du roi David d'Écosse de 1124 à 1133, puis entra à l'abbaye de Rievaux ou Rievaulx (York), qui était une filiale de Clairvaux. Il devint abbé de Revesby (Lincolnshire), puis en 1146, de Rievaulx.Père et guide d'une des plus grandes communautés de l'Europe d'alors. Aelred composa des écrits historiques, intéressant l'histoire de l'Angleterre médiévale, mais il est surtout connu comme auteur spirituel et, par là, comme un des représentants de la spiritualité monastique du XIIe siècle. Proche de saint Bernard, il témoigne, dans ses Sermons et ses traités - notamment Sur l'amitié spirituelle (De spirituali amicitia) et le Miroir de la charité (Speculum caritatis) -, d'une sensibilité religieuse qui s'appuie sur la tradition antique et revêt des accents très personnels.
Et ceci, dit l'ange, sera pour vous un signe : vous trouverez un enfant enveloppé de langes et déposé dans une mangeoire (cf. Lc 2, 12-13). Or, voici ce que je vous dis : vous devez aimer. Vous craignez le Seigneur des anges, mais aimez le petit enfant ; vous craignez le Seigneur de majesté, mais aimez ce petit emmailloté ; vous craignez celui qui règne dans le ciel, mais aimez celui qui est couché dans une mangeoire.
Quel signe les bergers ont-ils donc reçu ? Vous trouverez un enfant enveloppé de langes et couché dans une mangeoire. C'est lui le Sauveur, c'est lui le Christ, c'est lui le Seigneur. Mais qu'y a-t-il de remarquable à être emmailloté et couché dans une mangeoire ? Est-ce que les autres enfants ne sont pas emmaillotés aussi ? En quoi consiste donc ce signe ?
Il est remarquable, certes, mais pourvu que nous le comprenions. Nous comprenons non seulement si nous entendons la nouvelle, mais si nous avons aussi dans notre cœur la lumière qui apparut avec les anges. L'ange qui proclama le premier la bonne nouvelle apparut entouré de lumière pour nous apprendre que ceux-là seuls entendent vraiment, qui ont dans l'esprit la lumière spirituelle.
On pourrait dire bien des choses sur ce signe, mais comme l'heure passe je n'en dirai que peu et brièvement. Bethléem, " la maison du pain ", c'est la sainte Église, où l'on distribue le corps du Christ, le vrai pain. La mangeoire de Bethléem, dans l'Église, c'est l'autel. C'est là que se nourrissent les familiers du Christ. Au sujet de cette table, il est écrit : Tu prépares la table pour moi (cf. Ps 23(22), 5). Dans cette mangeoire se trouve Jésus emmailloté. Cet enveloppement de langes, c'est l'aspect extérieur des sacrements. Dans cette mangeoire, sous l'apparence du pain et du vin, il y a le vrai corps et le vrai sang du Christ. Là, nous voyons qu'il y a le Christ en personne, mais enveloppé de langes, c'est-à-dire présent de façon invisible sous les sacrements. Nous n'avons pas de signe aussi grand et aussi évident de la naissance du Christ que le fait de consommer quotidiennement son corps et son sang au saint autel, et le fait que lui, qui est né pour nous d'une vierge une seule fois, nous le voyons chaque jour s'immoler pour nous.
Donc, mes frères, hâtons-nous vers la crèche du Seigneur, mais, autant que nous le pouvons, préparons-nous à cette approche par sa grâce, en tant qu'associés aux anges, avec un cœur pur, une bonne conscience et une foi sincère (cf. 2 Co 6, 6), nous chanterons au Seigneur par toute notre vie et notre comportement : Gloire à Dieu dans les hauteurs, et sur la terre paix aux hommes, objet de sa bienveillance (cf. Lc 2, 14). Par notre Seigneur Jésus Christ, à qui appartiennent l'honneur et la gloire pour les siècles des siècles.
Amen !
Sermons pour Noël 2, PL 195, 226-227
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Moine et abbé cistercien, né à Hexham, Aelred (ou Ailred) vécut à la cour du roi David d'Écosse de 1124 à 1133, puis entra à l'abbaye de Rievaux ou Rievaulx (York), qui était une filiale de Clairvaux. Il devint abbé de Revesby (Lincolnshire), puis en 1146, de Rievaulx.Père et guide d'une des plus grandes communautés de l'Europe d'alors. Aelred composa des écrits historiques, intéressant l'histoire de l'Angleterre médiévale, mais il est surtout connu comme auteur spirituel et, par là, comme un des représentants de la spiritualité monastique du XIIe siècle. Proche de saint Bernard, il témoigne, dans ses Sermons et ses traités - notamment Sur l'amitié spirituelle (De spirituali amicitia) et le Miroir de la charité (Speculum caritatis) -, d'une sensibilité religieuse qui s'appuie sur la tradition antique et revêt des accents très personnels.
Tableau de l`Adoration des bergers de Georges Latour c.1664 (Huile sur toile)