L`esplanade du Temple de Jérusalem sur laquelle est constuite aujourd`hui la mosquée d`Omar
Les premières lignes du récit évangélique qui vient d’être lu présente une réunion au sommet, pourrait-on dire, de Jésus avec ses proches, les Douze, qu’il prend à part avant de monter à Jérusalem. « Voici que nous montons à Jérusalem » leur dit-il. Et de leur expliquer, d’un part, le sens de sa mission et, d’autre part, l’environnement dans lequel il souhaite que se transmette son héritage.
Arrêtons-nous un instant sur ces deux points pour en dégager des applications pour notre communauté invitée, elle aussi, à « monter à Jérusalem » dans les années à venir.
I – Une mission qui sort de l’ordinaire et qui dérange
Le mouvement de la mission du Fils de l’Homme passe par un chemin inattendu pour ses proches et pour ses disciples. Jésus ne leur cache pas le sens du parcours qui sera le sien. Descendu parmi les siens, le Verbe de Dieu s’anéantit lui-même en prenant la nature humaine, il s’offre totalement à l’amour miséricordieux du Père qui le relève et le ressuscite le troisième jour (cf. saint Paul Philippiens 2, 6-11). « Voici que nous montons à Jérusalem. Le Fils de l'homme sera livré aux chefs des prêtres et aux scribes, ils le condamneront à mort et le livreront aux païens pour qu'ils se moquent de lui, le flagellent et le crucifient, et, le troisième jour, il ressuscitera.» (Mathieu, 20, 18)
Voilà le cœur de la mission de Jésus : s’offrir totalement à la volonté du Père pour le salut du plus grand nombre, « donner sa vie en rançon pour la multitude » comme le dit la dernière phrase de l'évangile qui vient d'être lu.(Mathieu 20, 28)
Frères et sœurs, consacrés par le Baptême les disciples de Jésus ne suivront pas un chemin différent. Les années qui viennent au Québec peuvent faire peur et inquiéter à certains moments. Nous montons, nous aussi, à Jérusalem. Point n’est besoin de se surprendre des difficultés du chemin. Sur les pas de Jésus, nous rencontrons la même humanité avec ses peurs, ses défis, ses attentes. Nos frères et sœurs humains ne sont pas à côté du chemin vers Jérusalem, ils sont avec nous en marche à leur façon, mystérieuse parfois, mais bien réelle.
Comment les accompagner? Comment vivre entre nous le chemin de Jérusalem aujourd’hui?
II – L’environnement du chemin et des marcheurs
La clé nous est donnée par Jésus dans sa réponse à la mère de Jacques et Jean. Sa demande reflète bien une dynamique toujours présente même après 2000 ans. Les rapports entre humains suscitent volontiers une mauvaise compétition, des abus de pouvoirs, une domination écrasante. Jésus renverse la situation et propose un environnement renouvelé où la liberté et l’entraide seront désormais le soutien des marcheurs. Pour y arriver, il faut, explique-t-il, que le marcheur se tourne vers l’autre et cesse de se recroqueviller sur lui-même dans un enfermement néfaste. Comment? En se situant dans un environnement de service à 100 pour 100.
Écoutez cette consigne : « Vous le savez : les chefs des nations païennes commandent en maîtres, et les grands font sentir leur pouvoir. Parmi vous, il ne doit pas en être ainsi : celui qui veut devenir grand sera votre serviteur; et celui qui veut être le premier sera votre esclave ».
Sur la route de Jérusalem, en ce temps de Carême, en cette relance de la vie de notre Église par l’arrivée d’un nouveau pasteur, nous avons de belles occasions de laisser naître en nous et dans l’Église des gestes concrets et porteurs de renouveau. À chacun et à chacune de les identifier et de se mettre en route.
III - Un fondateur toujours en marche
Le fondateur du Séminaire, le bienheureux François de Laval, peut nous servir d’exemple et de modèle. Il fut en marche durant toute sa vie donnée pour son « Église naissante » comme il aimait à qualifier l’Église de Nouvelle-France.
Il fut un marcheur infatigable dans tous les sens du mot. On le voyait racontent les Relations de Jésuites en raquette sur la neige en hiver ou en canot faisant le tour de son immense diocèse. À son arrivée à Québec, le 16 juin 1659, il n’eut rien de plus pressé que de visiter toutes les maisons du petit village de 300 personnes qu’était Québec à l’époque ainsi que les cabanes des Amérindiens précise les Relations. Et cet élan ne se démentît jamais jusqu’à la fin de sa vie.
Pour les prêtres du Séminaire il voulait qu’ils soient disposés à être envoyés « à toutes rencontres, et au besoin dans les paroisses, et tous autres lieux du dit Pays, » où les pousseraient les besoins d’évangélisation et le souci pastoral des populations. En 1698, il envoya même un groupe de prêtres du Séminaire sur les bords du Mississipi comme missionnaires.
Il voulait que les séminaristes soient solidement formés pour maintenir l’élan missionnaire qu’il avait su infuser dans son Église. Ainsi écrit-il le 26 mars 1659 dans l’Acte de fondation du Séminaire qui en même temps met sur pied le Grand Séminaire : « Considérant qu'il a plu à la Divine Providence nous charger de l'Église naissante du Canada dit la Nouvelle-France; et qu'il est d'une extrême importance dans ses commencements de donner au Clergé la meilleure forme qui se pourra pour perfectionner des ouvriers, et les rendre capables de cultiver cette nouvelle vigne du Seigneur, en vertu de l'autorité qui nous a été commise, nous avons érigé et érigeons dès à présent, et à perpétuité, un Séminaire pour servir de Clergé à cette nouvelle Église…dans lequel on élèvera et formera les jeunes Clercs qui paraîtront propres au service de Dieu, et auxquels, à cette fin, on enseignera la manière de bien administrer les sacrements, la méthode de catéchiser et prêcher apostoliquement, la Théologie morale, les cérémonies, le plain-chant grégorien, et autres choses appartenant au devoir d'un bon Ecclésiastique ».
Ces rappels de circonstance sont pour nous aujourd’hui un stimulant à prendre nous aussi la « route de Jérusalem » où remplis de confiance et d’élan, appuyés sur ces devanciers qui n’ont eu peur d’aucuns défis nous répondrons aux appels du Seigneur pour une « nouvelle évangélisation », « nouvelle » dans ses moyens et dans son ardeur.
Conclusion
Ce défi est le nôtre aujourd’hui. Nous pouvons compter que l’Esprit de Dieu souffle toujours et qu’il guidera nos pas sur cette route. Pour nous accompagner nous avons une nourriture à nulle autre pareille. Assidus à la Parole et à la fraction du pain comme les premiers chrétiens (cf. Actes 2, 42), nous pourrons rendre dans notre société le témoignage que Jésus est toujours vivant et qu’il est venu pour servir et donner sa vie pour la multitude.
C’est donc dans une attente vigoureuse et une espérance ferme que nous refaisons les gestes de l’Eucharistie en ce jour d’anniversaire et que nous demandons au Seigneur de devenir de plus en plus serviteurs de nos frères et sœurs. C’est la grâce que je nous souhaite à tous et à toutes.
Amen!
Mgr Hermann Giguère, P.H.
Le 24 mars 2010
Arrêtons-nous un instant sur ces deux points pour en dégager des applications pour notre communauté invitée, elle aussi, à « monter à Jérusalem » dans les années à venir.
I – Une mission qui sort de l’ordinaire et qui dérange
Le mouvement de la mission du Fils de l’Homme passe par un chemin inattendu pour ses proches et pour ses disciples. Jésus ne leur cache pas le sens du parcours qui sera le sien. Descendu parmi les siens, le Verbe de Dieu s’anéantit lui-même en prenant la nature humaine, il s’offre totalement à l’amour miséricordieux du Père qui le relève et le ressuscite le troisième jour (cf. saint Paul Philippiens 2, 6-11). « Voici que nous montons à Jérusalem. Le Fils de l'homme sera livré aux chefs des prêtres et aux scribes, ils le condamneront à mort et le livreront aux païens pour qu'ils se moquent de lui, le flagellent et le crucifient, et, le troisième jour, il ressuscitera.» (Mathieu, 20, 18)
Voilà le cœur de la mission de Jésus : s’offrir totalement à la volonté du Père pour le salut du plus grand nombre, « donner sa vie en rançon pour la multitude » comme le dit la dernière phrase de l'évangile qui vient d'être lu.(Mathieu 20, 28)
Frères et sœurs, consacrés par le Baptême les disciples de Jésus ne suivront pas un chemin différent. Les années qui viennent au Québec peuvent faire peur et inquiéter à certains moments. Nous montons, nous aussi, à Jérusalem. Point n’est besoin de se surprendre des difficultés du chemin. Sur les pas de Jésus, nous rencontrons la même humanité avec ses peurs, ses défis, ses attentes. Nos frères et sœurs humains ne sont pas à côté du chemin vers Jérusalem, ils sont avec nous en marche à leur façon, mystérieuse parfois, mais bien réelle.
Comment les accompagner? Comment vivre entre nous le chemin de Jérusalem aujourd’hui?
II – L’environnement du chemin et des marcheurs
La clé nous est donnée par Jésus dans sa réponse à la mère de Jacques et Jean. Sa demande reflète bien une dynamique toujours présente même après 2000 ans. Les rapports entre humains suscitent volontiers une mauvaise compétition, des abus de pouvoirs, une domination écrasante. Jésus renverse la situation et propose un environnement renouvelé où la liberté et l’entraide seront désormais le soutien des marcheurs. Pour y arriver, il faut, explique-t-il, que le marcheur se tourne vers l’autre et cesse de se recroqueviller sur lui-même dans un enfermement néfaste. Comment? En se situant dans un environnement de service à 100 pour 100.
Écoutez cette consigne : « Vous le savez : les chefs des nations païennes commandent en maîtres, et les grands font sentir leur pouvoir. Parmi vous, il ne doit pas en être ainsi : celui qui veut devenir grand sera votre serviteur; et celui qui veut être le premier sera votre esclave ».
Sur la route de Jérusalem, en ce temps de Carême, en cette relance de la vie de notre Église par l’arrivée d’un nouveau pasteur, nous avons de belles occasions de laisser naître en nous et dans l’Église des gestes concrets et porteurs de renouveau. À chacun et à chacune de les identifier et de se mettre en route.
III - Un fondateur toujours en marche
Le fondateur du Séminaire, le bienheureux François de Laval, peut nous servir d’exemple et de modèle. Il fut en marche durant toute sa vie donnée pour son « Église naissante » comme il aimait à qualifier l’Église de Nouvelle-France.
Il fut un marcheur infatigable dans tous les sens du mot. On le voyait racontent les Relations de Jésuites en raquette sur la neige en hiver ou en canot faisant le tour de son immense diocèse. À son arrivée à Québec, le 16 juin 1659, il n’eut rien de plus pressé que de visiter toutes les maisons du petit village de 300 personnes qu’était Québec à l’époque ainsi que les cabanes des Amérindiens précise les Relations. Et cet élan ne se démentît jamais jusqu’à la fin de sa vie.
Pour les prêtres du Séminaire il voulait qu’ils soient disposés à être envoyés « à toutes rencontres, et au besoin dans les paroisses, et tous autres lieux du dit Pays, » où les pousseraient les besoins d’évangélisation et le souci pastoral des populations. En 1698, il envoya même un groupe de prêtres du Séminaire sur les bords du Mississipi comme missionnaires.
Il voulait que les séminaristes soient solidement formés pour maintenir l’élan missionnaire qu’il avait su infuser dans son Église. Ainsi écrit-il le 26 mars 1659 dans l’Acte de fondation du Séminaire qui en même temps met sur pied le Grand Séminaire : « Considérant qu'il a plu à la Divine Providence nous charger de l'Église naissante du Canada dit la Nouvelle-France; et qu'il est d'une extrême importance dans ses commencements de donner au Clergé la meilleure forme qui se pourra pour perfectionner des ouvriers, et les rendre capables de cultiver cette nouvelle vigne du Seigneur, en vertu de l'autorité qui nous a été commise, nous avons érigé et érigeons dès à présent, et à perpétuité, un Séminaire pour servir de Clergé à cette nouvelle Église…dans lequel on élèvera et formera les jeunes Clercs qui paraîtront propres au service de Dieu, et auxquels, à cette fin, on enseignera la manière de bien administrer les sacrements, la méthode de catéchiser et prêcher apostoliquement, la Théologie morale, les cérémonies, le plain-chant grégorien, et autres choses appartenant au devoir d'un bon Ecclésiastique ».
Ces rappels de circonstance sont pour nous aujourd’hui un stimulant à prendre nous aussi la « route de Jérusalem » où remplis de confiance et d’élan, appuyés sur ces devanciers qui n’ont eu peur d’aucuns défis nous répondrons aux appels du Seigneur pour une « nouvelle évangélisation », « nouvelle » dans ses moyens et dans son ardeur.
Conclusion
Ce défi est le nôtre aujourd’hui. Nous pouvons compter que l’Esprit de Dieu souffle toujours et qu’il guidera nos pas sur cette route. Pour nous accompagner nous avons une nourriture à nulle autre pareille. Assidus à la Parole et à la fraction du pain comme les premiers chrétiens (cf. Actes 2, 42), nous pourrons rendre dans notre société le témoignage que Jésus est toujours vivant et qu’il est venu pour servir et donner sa vie pour la multitude.
C’est donc dans une attente vigoureuse et une espérance ferme que nous refaisons les gestes de l’Eucharistie en ce jour d’anniversaire et que nous demandons au Seigneur de devenir de plus en plus serviteurs de nos frères et sœurs. C’est la grâce que je nous souhaite à tous et à toutes.
Amen!
Mgr Hermann Giguère, P.H.
Le 24 mars 2010